André Kaminker, pionnier de l’interprétation simultanée
Le présent texte est une adaptation de l’article publié le 13 avril 2020 sur jazlebontemps.com.
André Kaminker est né en 1888 d’un père polonais et d’une mère autrichienne. Il grandit en Belgique Flammande où il est scolarisé en français. Pendant ses études secondaires, il apprend l’anglais grâce à quelques séjours en Grande-Bretagne. À peine majeur, il est déjà quadrilingue.1
Étant né en France de parents étrangers, à sa majorité, André Kaminker opte pour la nationalité française.1
Apr´s une carrière de journaliste à la radio au Poste parisien, il commence une carrière d’interprète de conférence, à la Société des Nations et la Chambre de commerce internationale.1
En 1934, Hitler prononce son fameux discours à Nuremberg au VIe congrès du parti du Reich. Par-delà la frontière, à plus de 800 km, les auditeurs de la radio française sont époustouflés d’entendre le discours dans leur propre langue, à mesure qu’il est prononcé en allemand. André Kaminker avait accepté à contrecœur d’interpréter le discours en français, traduisant chaque mot et chaque idée en temps réel. Cela n’avait jamais été tenté, et Kaminker lui-même doutait que ce soit faisable. Mais il a réussi et a fait naître une nouvelle forme de communication : l’interprétation simultanée.1
En 1945, le lieutenant Kaminker est détaché par l’armée française pour interpréter à la conférence fondatrice de l’Organisation des Nations Unies à San Francisco où il est la véritable star de la conférence.1
| Devenu fonctionnaire à l’ONU dès 1946, comme nombre des « grands » de la profession à l’époque, Kaminker s’oppose à l’introduction de la simultanée, qu’il a pourtant initiée, au profit de la consécutive. Après sa retraite de l’ONU en 1949, il rejoint le Conseil de l’Europe à Strasbourg et en devient le chef interprète, appelé affectueusement « Sir Boss » par les interprètes.1 |
André Kaminker était l’un des grands consécutivistes. Il mettait son énorme front entre ses mains, sans prendre la moindre note – sinon pour quelques chiffres –, comme en apnée de longues minutes au point qu’il semblait dormir. Puis il reconstituait dans un français clair et précis, coulant de source, ce qu’un délégué venait de déclarer dans l’une des nombreuses langues européennes qu’il maîtrisait.1
En 1953, André Kaminker co-fonde l’AIIC (Association internationale des interprètes de conférence). Il en est le premier président, de 1953 à 1956.1
Pendant sa présidence de l’AIIC, Kaminker était sensé prêter son concours à la rédaction du Code d’honneur. Il gribouilla sur un bout de papier et dit : « Le voilà, votre code d’honneur. » Sur la feuille il y avait une seule phrase : « L’interprète de conférence est tenu au secret professionnel. »2
1 https://jazlebontemps.com/2020/04/13/andre-kaminker-pere-de-simone-signoret/
2 https://www.erudit.org/fr/revues/meta/2004-v49-n3-meta816/009380ar.pdf